Il n’y a plus de « maitres » ou de « maitresses » d’école. Les jeunes enfants sont aujourd’hui confiés, quatre jours sur sept seulement, depuis Lionel Jospin à des « professeurs d’école ».
Dans les débuts de l’école républicaine, celle de Jules Ferry et de quelques autres, on accordait une grande importance à l’instruction du peuple et à la formation des maitres d’une école laïque qui devait damer le pion aux écoles des « frères ». Les écoles normales primaires départementales étaient chargées de former en trois ans les « hussards noirs » exaltés par Péguy et destinés à éduquer de 6 à 12 ans, les modestes jeunes français alors majoritairement paysans.
Dans les débuts de l’école républicaine, celle de Jules Ferry et de quelques autres, on accordait une grande importance à l’instruction du peuple et à la formation des maitres d’une école laïque qui devait damer le pion aux écoles des « frères ». Les écoles normales primaires départementales étaient chargées de former en trois ans les « hussards noirs » exaltés par Péguy et destinés à éduquer de 6 à 12 ans, les modestes jeunes français alors majoritairement paysans.
Au lendemain de la 2ème guerre mondiale, les normaliens et normaliennes y préparaient le bac en 3 ans et le métier en un an. Jean Mourot a été de ceux-là. Quasiment tous issus de la petite paysannerie ou de la classe ouvrière dont ils sont restés proches, les diplômés de ces écoles normales constituèrent l’élite des instituteurs et institutrices de l’après-guerre. Ils fournirent les premiers contingents des professeurs de collège lors des réformes initiées à partir de 1960.
Au-delà de l’évocation narcissique de ces années cruciales où l’adolescent devient homme, qui furent pour lui des années heureuses, en dépit des séquelles de la guerre, de la rigueur du régime scolaire et de quelques déboires personnels, le livre de Jean Mourot se veut un témoignage de ce que fut l’existence quotidienne des normaliens de la première moitié des années cinquante, entre la fin de la guerre d’Indochine et le début de celle d’Algérie, quand l’arrivée dans les classes des enfants du « baby-boom » exigeait un nombre toujours croissant de maitres et de maitresses d’école et qu’on ne craignait pas de confier des classes à de tout neufs bacheliers forts de leur seuls souvenirs d’enfance… C’est un témoignage qui se lit comme un roman, le roman vrai d’un jeune homme à l’orée d’une vie professionnelle aujourd’hui terminée.
Jean Mourot- À l’école des hussards noirs -Mémoires d’un élève-maitre 1951-1955
Books on Demand mars 2010– ISBN 13 : 978-2810618316 – 276 p. illustrées- 16,90 €
Extraits consultables sur Google livres
1 commentaire:
Quand ne sonnait pas encore le glas des Ecoles Normales!
Les Ecoles Normales ont été supprimées définitivement par Lionel Jospin en 1990.
Ses prédécesseurs avaient déjà mis fin en 1969 à l'existence du recrutement en fin de troisième...Avant ces deux dates funestes, des enfants de paysans et d'ouvriers, donc de milieux modestes pouvaient accéder à des études prises en charge par l'Etat et menant au métier d'instituteur ou d'institutrice.
Ces futurs « hussards noirs » ont instruit et éduqué des dizaines de millions d'enfants afin qu'ils accèdent aux savoirs.
Jean Mourot, instituteur à la retraite raconte dans ce livre ses mémoires d'élève maître de la promotion rouennaise 1951-1955.
Le portrait qu'il peint avec sa plume ne comporte pas que des couleurs vives et gaies.
L'auteur relate la vie dans ce laboratoire laïque, cette chrysalide, un peu "éteignoir", "d'où est issue l'élite des enseignants du premier degré d'une époque où tant de jeunes bacheliers étaient jetés dans aucune formation dans des classes de 30 à 40 élèves."
Ces normaliens découvrent un univers particulier et vont durant quatre ans se préparer à enseigner aux fils et filles du peuple.
L'existence y était austère et l'ordre « républicain » régnait dans ces établissements.
Ganne, militant communiste qui possédait un stock de journaux de propagande a été traduit en conseil de discipline puis exclu de l'Ecole Normale de Rouen alors qu'il était en quatrième année donc en formation professionnelle!
On ne badinait pas avec la « neutralité » de l'école en cette période historique où la réaction était reine... C'était au moment de la première loi anti laïque dite lois Marie-Barangé....
Ces Etablissements évolueront...à la fin des années 60, il était beaucoup plus rare qu'un normalien soit viré pour des raisons politiques.
Dans cette EN comme dans d'autres, les jeunes élèves maîtres se construisaient comme futurs éducateurs dès l'entrée en seconde et l'engagement social suivait un cheminement lent mais efficace.
Laissons parler Jean Mourot qui avant de devenir un syndicaliste révolutionnaire pensait que les préoccupations devaient ne pas être pas politiques mais d'ordre professionnel et social:
« Laissant l'action militante aux entragés, je n'en adhérai pas moins au SNI-et donc à la FEN-par pragmatisme et pour disposer des fiches pédagogiques et de l'information corporative de « l'Ecole Libératrice »...
A cette époque il y avait chez les instituteurs 80% de syndiqués et pratiquement un seul syndicat...
Cette adhésion corporative et pédagogique a duré longtemps.
En 1969, trésorier du SNI ( Syndicat National des Instituteurs) à l'EN de Melun, je récoltais chez les « formations professionnelles », à la sortie de la paye les cotisations de 95% des promotions!
Jean Mourot profite de l'occasion de ce voyage dans son passé pour évoquer sa participation et celle d'autres élèves maîtres à des activités théâtrales... Toute cette mise en scène permettait de préparer les futurs enseignants à animer les amicales laïques de villages et de villes.
Les jeunes entrés à l'école normale à 15 ans sortaient de l'adolescence à l'entrée en formation professionnelle pour devenir l'année suivante des hommes "prêts à affronter un métier dont nous ne découvririons les dures réalités qu'une fois sortis du cocon de l'Ecole Normale"...
Aujourd'hui il n'y a plus de "cocon", plus de préparation au métier et des jeunes hommes et femmes sont envoyés dans des classes avec comme seul bagage un diplôme universitaire.
Jean-François Chalot
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